samedi 16 novembre 2013

Mot à maux

Avoir imaginé qu'il l'admettrait, après tant d'années. Pourtant, il a dit J'en conviens, Probablement, Oui bien sûr. Il n'empêche, comment croire qu'il reconnaissait ce qu'il avait toujours nié? Barcelone, ce soir d'août. Nous étions restés longtemps à la plage. Nous étions rentrés, fatigués de soleil. Nous avions passé la soirée sur la terrasse. La nuit était lourde, sans un souffle d'air. Et puis c'est arrivé. Survenu. Barcelone, ce soir d'été où tout semblait éternel, immuable. Soudain, ce mot qui nous a anéantis. Il l'a prononcé, d'un ton neutre, comme par mégarde. Ce mot arrogant a fait irruption, rendant désormais notre vie inconcevable. Je l'entends encore. Et c'est moi qui l'aurais prononcé. Lâché. Pendant tout ce temps, je l'aurais rendu, lui, responsable de cette trahison, incapable que j'étais d'articuler aucun de ces autres mots qui auraient vaincu celui que ma peur de le perdre avait laissé échapper.
Alors, ce serait moi…


Je lui accorde un silence navré. Cette soirée, je l'ai oubliée. Cet amour forcené, intransigeant, m'est inconnu. J'étais amoureux. D'elle, sans doute. De Barcelone, passionnément. Belle Catalane, espiègle et bouillonnante. Ce mot assassin qui nous aurait poignardés en plein cœur, je l'ignore. J'en ai d'autres, qu'elle refuserait. Plaza del Sol, El Born, tapas con vino, Barceloneta, mariscada o cava, El Raval, fiesta y mojito. A moins que, peut-être, tibi dabo, promesses que je ne tiendrai pas.
Elle voulut que ce mot fatidique fût proféré une fois encore, maintenant, pour que nous sachions. Abolir la parole funeste, dit-elle. Elle attendait, espérait que je
Elle hurla: –––––––––––––
Je n'entendis qu'un cri.
Photo:YLD