Les bras et les jambes maculés de bleus. Les genoux, les chevilles et les épaules douloureux. Chaque fois que j'entre dans la chambre, la pièce se rapetisse, se recroqueville. Nous n'avons plus assez de place pour nous deux dans cet espace étriqué. Son regard incisif et son sourire acéré disent assez qu'elle entend y résider en majesté. Chacune de mes intrusions aiguise sa jalousie, décuple sa férocité. Les coups pleuvent. Gifles, griffures, coups de pied. Elle me pince, me tire les cheveux, me mord. Je me plaque contre les murs, louvoie pour atteindre mon lit, me faufile jusqu'à l'armoire, essayant de me tenir à distance respectueuse, de maintenir une zone de sécurité entre elle et moi. Mes manœuvres échouent. Elle déjoue mes ruses et reprend l'offensive. Je tente une parade. Elle riposte par une feinte et porte une touche. Exténuée, je bats en retraite. Tous les matins, je dois lui disputer un chemisier, lui arracher un pantalon, lui extorquer une robe, lui soutirer un pull. Embusquée dans le miroir de la penderie, elle s'acharne à m'enlaidir. Elle me renvoie l'image amochée d'une silhouette aux lignes heurtées. Le désolant reflet d'une féminité en perdition.
Tu te veux une femme séduisante, moulée dans mes corsages qui dévoilent tes rondeurs excitantes, gainée dans mes minijupes qui soulignent tes courbes appétissantes. Tu t'ingénies à m'incarcérer dans ce corps accidenté. Tu mens. Ce n'est pas moi. Pas moi!
Photo: YLD, La Tentation de saint Antoine, J. BoschTu te veux une femme séduisante, moulée dans mes corsages qui dévoilent tes rondeurs excitantes, gainée dans mes minijupes qui soulignent tes courbes appétissantes. Tu t'ingénies à m'incarcérer dans ce corps accidenté. Tu mens. Ce n'est pas moi. Pas moi!