Régulièrement, je suis prise d'une fureur subversive –Du passé faisons table rase. Alors, faute de changer le monde, je révolutionne mon salon. La bibliothèque, qui régnait sur tout un pan de mur, est exilée au fond de la pièce; le canapé, qui trônait entre la porte-fenêtre et la chaîne hi-fi, est relégué en face de la télé. Livres et CD sont expatriés au beau milieu du séjour en attendant une vaste refonte de leur rangement –le classement alphabétique, jugé illégitime, antidémocratique, voire réactionnaire, ayant été proscrit. Tandis que j'entreprends de résoudre la profonde contradiction entre littérature noble et roman de gare, d'abolir les privilèges du jazz et de libérer le rock de l'oppression, je déniche une photo de la tombe de Pierre Desproges prise l'été dernier au Père-Lachaise. Une admiratrice y avait déposé un petit billet par lequel elle le remerciait d'avoir été son guide… au même titre que Depeche Mode.
Tiens donc, Desproges et Depeche Mode! Je venais de trouver le principe fondamental qui allait désormais régir mon univers. Marguerite Duras pactisa, bon gré mal gré, avec les Clash. Maurice Blanchot fraternisa tant bien que mal avec Sonic Youth. Jorge Luis Borges sympathisa, autant que faire se peut, avec Queens of the Stone Age. Visuellement, le résultat –une sorte de collectif réunissant CD et bouquins toutes tailles confondues– n'était certes pas des plus heureux, mais je n'étais pas mécontente d'avoir renversé le vieil ordre impérialiste qui nous aliénait. Lorsque l'homme de ma vie fit irruption dans le salon pour vérifier si la camarade n'avait pas besoin d'un coup de main, il resta interdit.
–Radiohead et Beckett, même combat?
–Pas que je sache.
–Nabokov et LCD Soundsystem, compagnons de route?
–Probablement pas.
–Et donc?
–Le cœur a ses raisons…
–Ça, c'est sûrement pas dans la ligne du parti!
Photo YLD
Tiens donc, Desproges et Depeche Mode! Je venais de trouver le principe fondamental qui allait désormais régir mon univers. Marguerite Duras pactisa, bon gré mal gré, avec les Clash. Maurice Blanchot fraternisa tant bien que mal avec Sonic Youth. Jorge Luis Borges sympathisa, autant que faire se peut, avec Queens of the Stone Age. Visuellement, le résultat –une sorte de collectif réunissant CD et bouquins toutes tailles confondues– n'était certes pas des plus heureux, mais je n'étais pas mécontente d'avoir renversé le vieil ordre impérialiste qui nous aliénait. Lorsque l'homme de ma vie fit irruption dans le salon pour vérifier si la camarade n'avait pas besoin d'un coup de main, il resta interdit.
–Radiohead et Beckett, même combat?
–Pas que je sache.
–Nabokov et LCD Soundsystem, compagnons de route?
–Probablement pas.
–Et donc?
–Le cœur a ses raisons…
–Ça, c'est sûrement pas dans la ligne du parti!
8 commentaires:
Pierre Desproges, Frédéric Chopin, et Michel Petrucciani... réunis in fine. Quelle belle improbabilité. bravo pour ce nouveau bijou. Marise
Et ne pas oublier un peu de fenouil entre Bourvil et Alphonse Allais et une botte de poireau à côté du canapé... Ce sera parfait!;O)
@ Marise Les rencontres improbables sont bien souvent les plus belles, en effet.
@Luc Et puis un brin de persil et trois gousses d'ail… c'est l'assaisonnement qui fait le plat
Abolir les frontières "intellectuelles" est un programme auquel je souscris avec enthousiasme. Au passage, très bonne année !
@ Marie Alors que 2010 soit pluriel, multiculturel,chamarré et accueillant…
Inventons un monde pour notre bon plaisir, quelque chose qui a du sens pour toi.
Je te souhaite une trés bonne année.
B.
çà me rappelle que je n'ai jamais réussi à lire en écoutant de la musique, cette dernière envahit tout mon cerveau que certaines prétendent inapte à faire deux choses en même temps...
@passantepensante Ecrire, c'est sans doute un peu ça: inventer un monde différent!
@Philippe Moi non plus, je n'y arrive pas. Et pourtant mes copines me disent qu'une femme sait faire plusieurs choses en même temps…
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