Un Johnnie Walker le soir en rentrant, ça aide à avaler les contrariétés, tous ces trucs qui restent en travers de la gorge. Ça ne réconforte pas, ça ne réconcilie pas, ça console. Un whisky ou deux, plutôt deux, et tu évolues dans une réalité floutée, aux angles émoussés, tu gommes les aspérités, tu bazardes tes complexes, tu largues tes frustrations. D'un revers de main, tu envoies balader cette satanée bestiole planquée au fond de ta tête qui te reproche sans cesse ton manque d'envergure. Tu n'es pas Brad ni George, même pas Tom. Et alors? Des conneries. Vraiment rien à foutre. Tu redimensionnes, tu retouches, tu optimises. Mais le déclic libérateur peine de plus en plus à se déclencher. On appelle ça la tolérance. L'alcool, ta seule parade à l'intolérable béance qui te donne le vertige, à l'insupportable dégoût qui te retourne l'estomac, à ce déficit d'être qui te poisse d'angoisse. Le deuxième verre en convoque un troisième, un cinquième. Parfois –souvent–, tu forces la dose, juste de quoi te reconnaître dans ce mec gonflé, qui en met plein la vue. Affalé sur le canapé, tu les mates tous, ces crétins que la vie a mieux armés que toi. Ce soir, une bouteille ne suffit pas, tu en attaques une autre, comme hier, comme avant-hier.
You talking to me, hein?
Mais non, allez laisse tomber!
Même boire tu n'en as plus envie.
Johnnie se débattait dans son scotch, coulait, remontait, s'enfonçait, refaisait surface.
Tu a posé un doigt sur sa tête. Lentement, fermement, tu as appuyé.
Photo: YLD
You talking to me, hein?
Mais non, allez laisse tomber!
Même boire tu n'en as plus envie.
Johnnie se débattait dans son scotch, coulait, remontait, s'enfonçait, refaisait surface.
Tu a posé un doigt sur sa tête. Lentement, fermement, tu as appuyé.
Photo: YLD
10 commentaires:
Johnnie est un drôle de glaçon ...
Voilà qui me plaît. Vos textes que je préfère sont ceux dominés par une révolte sourde, une lutte, une violence. Où, en somme, vous vous lâchez. Avec un petit verre dans le nez ? :)
(tout abus d'alcool est mauvais pour la santé...)
@Fernand: oui, un mec un peu givré!
@Nicolaï: Vous m'incitez à écrire sans modération?
Ecrire, oui ! Boire non. Enfin c'est vous qui voyez hein.
S'il a coulé Johnny, c'est donc qu'il a arrêté de boire... (mais mon optimisme aujourd'hui m'empêche peut-être de comprendre la fin)
@Thaddée: ou qu'il n'a pas trouvé de bouée de sauvetage (ça, c'est la version pessimiste)
oui , lâchez-vous , maître Yola !
oops ou maîtresse comme dans le film !
ce qui est inquiétant avec l'angoisse c'est que çà pourrait rendre anxieux,ce qui dessèche le palais
@Cactus: une incitation à la débauche textuelle!
@Philippe: dans ce cas, faut-il comme dirait Vian, boire systématiquement?
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