Il en avait les moyens. Ses revenus lui permettaient de dédommager amplement sa femme. Il trompait généreusement Victoria, mais apaisait avec prodigalité ses blessures d'amour-propre: robes Valentino ou Prada, diamants, séjours dans un hôtel de luxe californien… La quarantaine l'assagit. Il n'éprouva plus le besoin de collectionner les maîtresses. Depuis six mois, Jeanne, de vingt ans sa cadette, était son unique escapade. Curieusement, Victoria, qui, jusqu'alors, semblait se satisfaire des compensations qu'il lui octroyait, redoubla d'exigences. Elle avait désiré un appartement à San Francisco, avait voulu un chalet à Megève. Elle venait d'obtenir une villa à Monaco. Jeanne, si désintéressée, si insouciante, l'accabla soudain de caprices fastueux. L'une marchandait ouvertement la paix matrimoniale; l'autre monnayait subrepticement ses sensuelles ingéniosités. Il ne s'en offusquait pas. Lui qui, dans le monde de la finance, avait bâti sa réputation sur son acharnement impitoyable soutenait que, pour jouer gagnant, il fallait chiffrer exactement la mise optimale, mesurer précisément les risques et évaluer finement le retour sur investissement. Il accédait donc, indifférent, aux revendications conjugales de Victoria et consentait, attendri, aux vœux fantasques de Jeanne.
Victoria était en vacances aux Caraïbes lorsqu'il reçut la lettre de son avocat l'informant qu'elle demandait le divorce. Cette sotte avait sans doute cru le doubler; elle lui donnait l'avantage du terrain. Il fit un peu traîner les choses, négocia, pour la forme, le montant de la prestation compensatoire. Un trade gagnant, finalement, se félicitait-il: il avait échangé une Victoria en net recul contre une Jeanne qui cotait en forte hausse.
Pourtant, ces derniers temps, quelque chose le tracassait. Evidemment, les indices boursiers n'étaient pas au beau fixe, mais compte tenu de la crise, ils n'étaient pas, non plus, particulièrement inquiétants. Les jours suivants, le CAC40, le Nikkei et le Dow Jones se maintinrent effectivement, mais Jeanne, elle, se volatilisa. Son téléphone restait muet, son appartement était occupé par un énergumène qui affirmait ne pas la connaître et ses copains de fac semblaient s'être passé le mot: il n'y avait vraiment pas de quoi stresser.
Victoria était en vacances aux Caraïbes lorsqu'il reçut la lettre de son avocat l'informant qu'elle demandait le divorce. Cette sotte avait sans doute cru le doubler; elle lui donnait l'avantage du terrain. Il fit un peu traîner les choses, négocia, pour la forme, le montant de la prestation compensatoire. Un trade gagnant, finalement, se félicitait-il: il avait échangé une Victoria en net recul contre une Jeanne qui cotait en forte hausse.
Pourtant, ces derniers temps, quelque chose le tracassait. Evidemment, les indices boursiers n'étaient pas au beau fixe, mais compte tenu de la crise, ils n'étaient pas, non plus, particulièrement inquiétants. Les jours suivants, le CAC40, le Nikkei et le Dow Jones se maintinrent effectivement, mais Jeanne, elle, se volatilisa. Son téléphone restait muet, son appartement était occupé par un énergumène qui affirmait ne pas la connaître et ses copains de fac semblaient s'être passé le mot: il n'y avait vraiment pas de quoi stresser.
Du patio, Victoria observait Jeanne, étendue nue, dorée, abandonnée, offerte, au bord de la piscine. Elle s'avança silencieusement, laissa glisser son paréo et se coula, frémissante, contre l'impudique alanguie, voguant langoureusement jusqu'à la conque blonde de Vénus.
Photo YLD: Three People on Four Benches, George Segal
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