La victoire n'est jamais définitive. Jusqu'au bout, je devrais remonter sur le ring, malgré la lassitude. Lorsque je raccrocherai, ce sera pour de bon, vaincu par KO debout. Jusque-là, mon adversaire ne me laissera pas de répit, remettant sans cesse son titre en jeu, lui qui n'a rien à perdre. Depuis le temps qu'on s'affronte, je connais sa tactique. Il fait mine de jeter l'éponge, de chercher un compétiteur à sa mesure, puis revient à la charge. Convaincu qu'il n'y a pas d'autre issue, je ravale ma rage et enfile une fois encore les gants. Assis dans le coin rouge, je jauge mon challenger, me mets en condition. Dès que le gong retentira, le manœuvrer, être plus rapide que lui, lui foutre la pression en permanence, ne pas le laisser prendre l'offensive.
Premier round, je me dérobe, me balance pour éviter qu'il ne m'atteigne. Rien à faire. Il s'économise, esquive habilement un jab à la tête, riposte par une rafale de directs au corps. Je suis à terre. J'entends l'arbitre scander les secondes: un, deux, trois, quatre, je dois me reprendre, cinq, six. Je me relève, titubant, porte un coup en aveugle au champion toutes catégories, sachant déjà que le verdict sera sans appel. Il me balade un moment, puis me pousse dans les cordes et me délivre une série de crochets du droit. Je suis sonné. A la dernière reprise, je tente le corps-à-corps; l'accrocher s'il le faut, le neutraliser le plus longtemps possible. Me sentant à l'agonie, il se dégage et me cueille en uppercut. Touché de plein fouet, je m'écroule.
Dans l'obscurité de mon cerveau, une sirène hurle. Ambulance? Une lumière verte, crue, douloureuse, me perce la rétine. Un écran à diodes clignote. Moniteur ECG? J'ouvre péniblement les yeux. Mon radio-réveil affiche 7h30. Je me lève, la tête dans un étau, le corps moulu.
Un jour, je l'enverrai au tapis cette saloperie d'insomnie.
Photo Antonio Recalcati, Protesta n°1
Premier round, je me dérobe, me balance pour éviter qu'il ne m'atteigne. Rien à faire. Il s'économise, esquive habilement un jab à la tête, riposte par une rafale de directs au corps. Je suis à terre. J'entends l'arbitre scander les secondes: un, deux, trois, quatre, je dois me reprendre, cinq, six. Je me relève, titubant, porte un coup en aveugle au champion toutes catégories, sachant déjà que le verdict sera sans appel. Il me balade un moment, puis me pousse dans les cordes et me délivre une série de crochets du droit. Je suis sonné. A la dernière reprise, je tente le corps-à-corps; l'accrocher s'il le faut, le neutraliser le plus longtemps possible. Me sentant à l'agonie, il se dégage et me cueille en uppercut. Touché de plein fouet, je m'écroule.
Dans l'obscurité de mon cerveau, une sirène hurle. Ambulance? Une lumière verte, crue, douloureuse, me perce la rétine. Un écran à diodes clignote. Moniteur ECG? J'ouvre péniblement les yeux. Mon radio-réveil affiche 7h30. Je me lève, la tête dans un étau, le corps moulu.
Un jour, je l'enverrai au tapis cette saloperie d'insomnie.
Photo Antonio Recalcati, Protesta n°1
6 commentaires:
Bah essaye Spinoza, à trois heures du mat', l'insomnie tient pas un round...
Les souffrances du jeune Werther pourraient aussi écraser n'importe quel adversaire sur le ring de nos nuits blanches...
j'aime cette photo ou peinture en traces
B.
@Vincent (bienvenue!) et Marise: merci pour vos “somnifères”, mais comme dirait Barbara: «A voir tant de gens qui dorment et s'endorment à la nuit,je finirai, c'est fatal, par pouvoir m'endormir aussi.»
@passante pensante; oui, c'est proche de ton univers…
je compatis, car je dors également mal actuellement. Néanmoins je suis d'accord avec Marise: Goethe est un sédatif, et même, dans le même temps (osons) : un suppositoire laxatif.
Evidement, il y a un je-ne-sais-quoi de contre-indiqué dans cette double propriété. Dommage.
beau texte en tous cas.
@le koala: c'est vrai que Goethe fait un peu cet effet-là… et merci du compliment.
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