Ce n'est pas mon père. Je porte son nom, mais je ne suis pas son fils. Bien sûr, on ne m'en a jamais parlé. Je le sais, c'est tout. J'espérais une confirmation. Je l'ai. Le magazine People vient de publier un article sur les célébrités étrangères qui aiment la France: Brad Pitt et Angelina Jolie, Johnny Depp et Vanessa Paradis, Mick Jagger. Je jette un œil distrait aux interview. Soudain, mon regard est attiré par une photo: le château d'Hérouville. C'est là, raconte le journaliste, qu'en octobre 1973 David Bowie a enregistré son album Pin Ups. Voilà la preuve irréfutable. Vous ne voyez pas? Dans les années 1970, mes grands-parents maternels étaient employés au château d'Hérouville. Je suis né en juillet 1974. Mon second prénom est David. Ici, tout le monde m'appelle Zig. Ce surnom me viendrait de mon grand-père, qui avait coutume de me rappeler à l'ordre en m'intimant d'arrêter de faire le zigoto. Foutaises! Je vais vous dire comment ça s'est passé. C'est au château que ma mère l'a rencontré, qu'ils se sont aimés. Trop obéissante, elle a préféré sacrifié sa passion à la morale. Elle a laissé partir David et a épousé Jean, un gentil garçon qui gagne honnêtement sa vie les mains dans le cambouis de son petit garage. La vérité devait éclater au grand jour. Ce dimanche, famille et amis étaient réunis pour fêter l'anniversaire de Jean. Je l'ai laissé soufflé ses bougies, et j'ai fait mon «coming out». Inutile de dissimuler plus longtemps mon identité. Cessez de mentir. J'ai retrouvé mon père, le vrai. Ils ont d'abord beaucoup rigolé, Jean, mes oncles, mes sœurs, les copains. Quand j'ai menacé ma mère avec le couteau qui avait servi à découper le gâteau, ils ont compris que je ne plaisantais pas.
Il y a trois jours que je suis enfermé dans cet hôpital psychiatrique de Pontoise. Je n'y resterai pas. Les médicaments que j'ai volés ce matin à l'infirmerie commencent à faire leur effet. Ma vue se brouille, mes jambes s'ankylosent, mes bras s'engourdissent. Ecouteurs sur les oreilles, volume à fond. Il suffit que je me tourne vers lui. Guitare acoustique, guitare électrique, batterie, cuivres, violon, et sa voix qui me suicide. Le temps prend une cigarette. Enfin Zig. A jamais poussière d'étoile.
Photo: YLD
Il y a trois jours que je suis enfermé dans cet hôpital psychiatrique de Pontoise. Je n'y resterai pas. Les médicaments que j'ai volés ce matin à l'infirmerie commencent à faire leur effet. Ma vue se brouille, mes jambes s'ankylosent, mes bras s'engourdissent. Ecouteurs sur les oreilles, volume à fond. Il suffit que je me tourne vers lui. Guitare acoustique, guitare électrique, batterie, cuivres, violon, et sa voix qui me suicide. Le temps prend une cigarette. Enfin Zig. A jamais poussière d'étoile.
Photo: YLD
4 commentaires:
ça me renvoie à mon grand fils dans mon réel à moi !
@Cactus: et il y a un peu de mon réel à moi aussi…
Ah, les histoires de filiation... ça remue toujours.
Bien triste celle-là !
@Viv: oui, c'est toujours un peu compliqué.
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